Patrick Allier - Sculpteur

Autoportrait
Autoportrait
 

BIOGRAPHIE

Patrick ALLIER
Rue du moulin JEANDET 71260 CRUZILLE
Tel : 0385332489 - Mail : patrickallier71@gmail.com
Né le 18 mai 1947 à Saint Etienne (42)
Etudes supérieures à Saint Etienne et Lyon

1972 - Premières tôles sculptées Collection Docteur Loubet (Sorbiers)
1979 - Exposition personnelle Sorbiers
1980 - Participation au Festival du Haut Mâconnais (Azé)
1981 - Exposition personnelle Galerie « La Traverse » (Saint Etienne)
1981 - Réalisation d'un bas relief (4m x 2m) Pierre et plomb fondu. Villa du Docteur Ferrand (La Talaudière)
1983 - Projet de parcours ludique pour le musée de la Villette (Paris)
1983 - Projet collectif d'Ateliers Populaires sur les villes de Montceau et du Creusot avec Antoine De Barry,
l'ADER et le ministère du temps libre.
1983 - Pierre ouverte gravée et plomb fondu Villa du Docteur Dimech (La Talaudière)
1984 - Projet « les modèles de fonderie » Musée des Sciences et Techniques (Paris)
1985 - COSMO pierre et fer Musée en plein air de Tournus
1985 - Exposition collective avec le CAPB à Trèves (RFA)
1985 - Exposition collective avec le CAPB Maison du Beuvray (Morvan)
1986 - Participation au Printemps de l'Art à Geugnon
1986 - Réalisation d'un mur peint de 30m x 2m Ville du Creusot
1987 - Exposition personnelle Galerie « UTOPIA » Saint Etienne
1987 - Exposition collective « Bizarre ? Vous voulez dire quotidien » Municipalité de Saint Etienne.
1988 - Exposition personnelle Centre culturel de l'Yonnne Auxerre
1988 - Achat d'une pièce par la DRAC
1989 - Exposition personnelle Galerie « UTOPIA » Saint Etienne
1989 - Exposition Galerie « LE LUTRIN » Lyon
1989 - Réalisation pour l'arbre de la liberté Pierres, fer, plomb fondu. Commune de Cruzille
Depuis 1990 exposition permanente à Cruzille 71260
2009 - Dessin pour la réalisation d'une fresque réalisée par Pédro DIAZ Commune de La Talaudière

  PARADE POUR UN SCULPTEUR

Dans cette maison de pierre au milieu des vignes, ce n’est pas un refuge qu’il est venu chercher. Il n’a pas fui le bruit et le désordre de nos villes natales pour, comme on dit, retourner à la terre. Radical, son geste l’est bel et bien, mais ne porte avec lui la nostalgie d’aucun enracinement.

J’imagine plutôt qu’il est venu ici pour y voir plus clair. Pour y voir tout court. Pour s’éclaircir le regard comme on s’éclaircit la voix. Pour se délier la main comme les langues se délient. Et ce qu’il a vu d’abord, c’est la pierre, la pierre de ce pays. Savait-il qu’il avait rendez-vous avec elle ? Je l’ignore pour ne pas le lui avoir demandé. Ce n’est pas une question qu’on pose. Mais la pierre était là qui l’attendait au coin de la vigne. Ainsi il ne retournait pas à la terre ; il allait à la pierre. Il est venu chercher ici la difficulté de l’art.

Ici la pierre qui y prenait garde jusqu’à lui ? Les hommes se moquaient bien d’elle et lui marchaient dessus. Peut-être pensaient-ils qu’avec elle leurs comptes étaient réglés, et qu’ils l’avaient pour toujours domestiquée. Ils ne la retenaient même pas dans leurs murs de pierres sèches.

Le sculpteur a redonné sa chance à la pierre, à répondu à son sourd défi depuis longtemps oublié. Au commencement de son travail il y a donc la pierre mais comprenons qu’il ne la traite pas comme un matériau ; son art ne se fait pas sur le dos de la pierre celle-ci est prise comme adversaire, un adversaire de taille . Les chances sont égales puisque l’artiste met sa peau en jeu de risquer d’être pétrifié dans son propre désastre.

D’abord ce furent des égratignures faites au corps de la pierre. Imaginez la jouissance de l’homme au moment où, pour la première fois, le plomb coula dans les tranchées ouvertes de la pierre atteinte à vif et scella, par cette lithographie insensé mais de haute signification, la violence du métallurgiste dans le minéral. Plus tard je me souviens de l’émotion de cruauté coupable allant avec tous les triomphes et les saccages prométhéens qui me saisit comme par surprise quand je vis la pierre enfermée dans sa première cage. Soulagement de voir ainsi l’homme rétabli dans ses prérogatives ataviques. Sans doutes une bataille était gagnée mais pas la guerre. Car déjà la pierre forçait ses barreaux avec sa tranquille puissance. Déjà elle s’animait, vivait puisqu’elle se déchaînait.

Nous en sommes à ce moment de suspens : nous savons que la pierre va se mettre dans tous ses états. Nous avons aujourd’hui sous nos yeux les premiers récits de cette histoire indéterminée. Ces œuvres offertes à nos regards nous concernent depuis toujours et nous rappellent que notre communauté est fondée sur un viol, ici figuré par celui de la pierre, un viol commis en commun et que nous avions oublié. Seul dans l’atelier de forgeron de village, Patrick Allier en refait le geste. Seul mais devant et pour tout le monde.

Texte de Jean François PEYRET pour l’exposition à la galerie La TRAVERSE mai –juin 1981

  DE LIENS ET DE LIEUX

Tailler puis coudre
Séparer puis rejoindre
Où est la cassure originelle ?
Comment faire avec ces éléments déjà là, si l'on ne vainc la chute ?
Se dresser puis s'effacer
Prélever et restituer
Pas de langueur mais la force douce qui fait se fondre
Dans l'aube tout est vigueur.
Retenir le cri
Que tout advienne désormais puisque je me démets
Ne pas maîtriser
Toute sauvagerie endiguée.
Pourquoi nommer les choses quand il leur suffit d'être montrées ?
Le nom pour recouvrir
Le dire le seul Nom qui vaille ?
Les Pénates, objets d'un culte domestique
Présences liées de toujours et d'aujourd'hui
Comme en suspension
Doux désir de durer
Totem, pyramide, cercle, ligne, traits.
Platitude exaucée
Surgissement énamouré

Pas de pesanteur
Juste la lourde attente
Se retourner dans sa cage comme dans sa tombe
Eternel retour sur soi
Suspendu par un désir extérieur
Frontalité reposée
Détour du regard fixe
Epaves, sédiments, trouvailles
La mer, la terre, le feu ont laissé à l'abandon
S'en saisir.
Et leur faire rendre raison.
La semence de pierre. Espérante.
Une infinie tension masquée
Innombrable solitude extrême qui naît
Se porte
Dérision du rire
Accablement des efforts pour porter au jour
telle disette soumise
Je porte en moi comme un écho de ténèbres
Quiétude exaltée.
Soucieuse.

Texte de Jacques BONNIEL pour le catalogue de l'exposition « CIMAISE A PRENDRE » au Centre Culturel de l'Yonne- Abbaye St Germain- Auxerre

  LES MODELES DE FONDERIE



La cessation d'activité des fonderies de Montchanin-Le Creusot laisse des ateliers déserts avec une odeur de mort : mort de l'usine, mort du travail de l'homme, de l'objet industriel, de tout un ensemble de relations, d'interactions entre les hommes.
Destruction des modèles nés des mains des ouvriers modeleurs que l'on appelait à juste titre «  les ébénistes de l'industrie ».
Modèle : Appareil permettant de reproduire une pièce déterminée par les procédés utilisés en fonderie pour la réalisation de l'empreinte du moule dans lequel sera coulée la pièce métallique ( Cf. Larousse).
Ce massacre est achevé par le bulldozer qui vide à grands coups de pelle ces ateliers des vestiges de leurs passés.

Mais l'artiste ne fait pas de discours, il organise la fête, face à cette mort il inscrira son activité dans la satisfaction véhémente de la pulsion de vie. Son résultat sera peut-être comme les masques Dogon ou les effigies Egyptiennes, des abandons en même temps que des défenses, mais il sera.

L'imaginaire est un voleur. Il voit la richesse des formes, des volumes qu'offrent ces modèles. Dans ce bric à brac de géants, il prélève sa dîme. Puis dans l'atelier, sans scrupule, il transforme les uns, en crée d'autres. Il les détourne de leur fonction première. Les appareils servant à répéter l'objet industriel se font alors l'écho des rêves les plus fous.

L'objet industriel a maintenant assez d'histoire pour parler à notre époque. Il est chargé de mémoire, il est donc sacré. Son lot est d'être soit ignoré, soit adulé. Entre l'ethnologue et le casseur, l'artiste se glisse et dérobe l'objet pour mieux le dévoiler, le rendre au autres, aux siens, comme totem de leurs vies. Savoir d'où l'on vient est un repère pour se guider ou l'on va.

Texte d'Alexandre de Bary et Patrick Allier